Des centaines de blessés palestiniens et des étrangers ont été évacués mercredi de la bande de Gaza, bombardée sans répit par l’armée israélienne qui a frappé comme la veille le camp de Jabaliya, le plus grand camp de réfugiés du territoire .
Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres s’est dit “atterré” par les frappes sur le camp de Jabaliya où vivent 116.000 réfugiés dans le nord de la bande de Gaza, ciblé par des bombardements mardi et mercredi.
Plusieurs journalistes ont pu constater d’importantes destructions sur les lieux, où des survivants remuaient les décombres à la recherche de survivants.
Le Hamas a fait état de dizaines de morts, pendant que des secouristes ont affirmé que des “familles entières” avaient été décimées.
Le Haut-commissariat aux droits de l’homme de l’ONU a estimé mercredi soir que ces bombardements pourraient constituer “des crimes de guerre”, “compte-tenu du nombre élevé de victimes civiles et de l’ampleur des destructions”.
L’armée israélienne, qui mène une offensive implacable à Gaza, a affirmé avoir éliminé le chef de l’unité anti-tanks du Hamas, Muhammad Atzar, dans ses frappes sur le camp mercredi.
“Mourir ou se rendre”
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a promis la “victoire” contre le Hamas. Le mouvement a le choix entre “mourir ou se rendre sans condition”, a martelé mercredi le ministre de la Défense, Yoav Gallant.
Abdul Issa Massoud, un habitant du camp âgé de 30 ans, a toutefois assuré qu’il n’y avait “pas de résistance (de combattants du Hamas, ndlr)” dans le camp. “Ils ont frappé un quartier résidentiel plein de jeunes et de personnes âgées”.
Le service de presse du Hamas a fait état dans la nuit de mercredi à jeudi de nouvelles “frappes israéliennes massives” dans le quartier de Tal al-Hawa, à l’ouest de la ville de Gaza, évoquant un nombre non précisé de victimes.
Une première opération d’évacuation a permis mercredi à 76 blessés palestiniens et 335 étrangers et binationaux, selon un responsable égyptien, de quitter le territoire via le poste-frontière de Rafah, le seul à ne pas être contrôlé par les forces israéliennes.
Le président américain Joe Biden s’est félicité de cette opération, assurant qu’elle avait été rendue possible grâce au “rôle moteur” des Etats-Unis, avec l’aide notamment du Qatar.
Mais l’ONG Médecins sans frontières (MSF) a souligné que “plus de 20.000 blessés restent à Gaza, avec un accès limité aux soins de santé”.
Et “l’attention ne doit pas se détourner des besoins encore plus grands” de milliers de malades “dont la santé est trop précaire pour être évacués”, a averti l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).
Blinken attendu vendredi dans la région
Chaque jour apporte ses craintes d’un embrasement régional. Dans ce contexte, le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken doit se rendre une nouvelle fois en Israël vendredi, puis en Jordanie, pays qui a rappelé mercredi son ambassadeur à Tel-Aviv.
La Turquie et l’Iran ont de leur côté appelé à la convocation d’une grande conférence internationale.
Le chef du Hamas, Ismaïl Haniyeh, a affirmé mercredi que la région ne connaîtrait pas de stabilité si les Palestiniens n’obtenaient pas leur “indépendance”.
Dans la bande de Gaza, près de 8.800 personnes, dont 3.648 enfants, ont été tuées depuis le 7 octobre dans les bombardements israéliens. Plus de 2.000 personnes sont portées disparues sous les décombres.
L’évacuation de blessés et d’étrangers de Gaza mercredi a constitué une rare éclaircie depuis le début de la guerre.
Les blessés ont été les premiers à passer par le poste-frontière de Rafah, avant l’évacuation de binationaux et d’étrangers, dont des Américains, Italiens, des Français, des Australiens et des Autrichiens.
“Pas un morceau de pain”
“Nous manquons des besoins humains les plus élémentaires (…). Depuis quatre jours, nous n’avons pas pu donner un morceau de pain à cet enfant”, a déclaré aux journalistes, Rafik al-Helou, un habitant de Gaza qui patientait, en famille, du côté palestinien.
La bande de Gaza est soumise depuis le 9 octobre par Israël à un “siège complet” qui prive sa population de livraisons d’eau, de nourriture et d’électricité. La situation humanitaire est jugée catastrophique pour ses 2,4 millions d’habitants.
Mercredi, le ministère de la Santé du Hamas a affirmé que 16 hôpitaux n’étaient plus opérationnels, sur les 35 que compte le territoire, selon l’OMS.
Mohammed Abu Selmeya, le directeur de l’hôpital al-Shifa à Gaza, le plus grand de l’enclave, a lancé un “dernier appel”, prévenant que le générateur principal risquait de s’arrêter faute de carburant. “Si ce générateur s’arrête, la prochaine annonce sera la mort de bébés dans les couveuses, la mort de malades sous respirateurs, en soins intensifs et dans les salles d’opération”, a-t-il lancé.
L’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) a indiqué que plus de 70 de ses collaborateurs avaient été tués depuis le 7 octobre, “souvent avec leurs familles”. Mais l’UNRWA “restera avec les Palestiniens à Gaza”, a assuré son directeur, Philippe Lazzarini, qui s’est rendu à Gaza mercredi.
Nouveaux camions
Soixante-et-un camions transportant des médicaments et de la nourriture sont arrivés dans la bande de Gaza mercredi, après 59 la veille, selon les autorités israéliennes. Mais l’ONU insiste sur la nécessité d’une aide beaucoup plus massive.
Après une première phase de bombardements massifs, Israël mène depuis le 27 octobre une opération au sol dans le nord du territoire, où des combats féroces l’opposent, au milieu des ruines, aux combattants du Hamas.
La guerre a également exacerbé les tensions à la frontière libanaise et en Cisjordanie occupée, où plus de 125 Palestiniens ont été tués depuis le 7 octobre par des tirs de soldats ou de colons israéliens, selon l’Autorité palestinienne.
D’après les autorités israéliennes, au moins 240 otages sont toujours aux mains du Hamas.
Le Hamas a affirmé que sept otages, “dont trois détenteurs de passeports étrangers”, avaient été tués mardi dans le premier bombardement du camp de Jabaliya.