Le plan de redressement débute par une faute républicaine ( Par Thierno Bocoum )

Le communiqué du Conseil des ministres de ce mercredi 30 juillet 2025 annonce que « Le Conseil a examiné et adopté le Plan de redressement économique et social présenté par Monsieur le Premier ministre. »

Cette phrase, en apparence anodine, cristallise à elle seule deux dérives graves et convergentes, la personnalisation croissante du pouvoir exécutif autour du Premier ministre et le contournement méthodique des institutions de la République.

D’un point de vue institutionnel, la formulation est troublante. Dans le régime politique sénégalais, c’est le Président de la République qui détermine la politique de la Nation (article 42 de la Constitution) et non son Premier ministre. Ce dernier dirige l’action du gouvernement dans le cadre fixé par le Chef de l’État mais ne peut se substituer à lui comme concepteur politique.

En affirmant que le plan a été présenté par le Premier ministre, le Conseil des ministres consacre une inversion des rôles constitutionnels où l’exécution se prend pour la source.

Le plus préoccupant encore est est que le plan ainsi adopté sera présenté au public ce vendredi 1er août au Grand Théâtre National, sous la présidence effective du chef de l’État, sans que l’Assemblée nationale n’ait été saisie ni même informée en séance publique de ses contenus, de ses implications budgétaires ou de ses choix stratégiques.

Ce déséquilibre institutionnel n’est pas une première. Il s’inscrit dans une logique déjà exprimée et assumée par le Premier ministre lui-même, qui, dès sa nomination, avait publiquement envisagé de faire sa déclaration de politique générale non pas devant l’Assemblée nationale mais devant un jury populaire.

Cette sortie, en rupture avec l’article 55 de la Constitution, fut alors perçue comme un incident de communication. Elle apparaît aujourd’hui comme une méthode de gouvernement.

Le schéma se répète et se précise. Le pouvoir exécutif élabore un plan stratégique, le Conseil des ministres l’adopte dans une formulation qui personnalise son origine, le Premier ministre s’érige en porteur exclusif du projet et le peuple est invité à l’applaudir avant même que ses représentants n’en débattent.

Autrement dit, la validation populaire précède la délibération parlementaire, dans une République où c’est pourtant l’inverse qui garantit l’État de droit. Le Parlement devient spectateur d’un plan déjà scellé, pendant que le gouvernement se drape dans une adhésion supposée, mise en scène.

Cette méthode est dangereuse. Elle confond communication et gouvernance, audience et légitimité, adhésion émotionnelle et cadre constitutionnel. Elle installe un pouvoir parallèle où la scène médiatique prend le pas sur les institutions, où la République devient un décor et où le gouvernement confisque le débat démocratique pour en faire un spectacle.

Le Sénégal ne se gouverne pas au théâtre. Un plan de redressement économique et social, dès lors qu’il implique des arbitrages budgétaires, fiscaux, sociaux et structurels, doit être présenté à la représentation nationale. C’est devant les députés que le Premier ministre doit répondre, c’est dans l’hémicycle que les choix doivent être justifiés et c’est dans la transparence que les arbitrages doivent être assumés.

Cela étant dit, nous attendons impatiemment le contenu de ce plan, malgré les vices de procédure qui l’ont entaché dès son lancement.

Les Sénégalais, en dehors des débats institutionnels, ne demandent qu’une seule chose qu’à sortir d’une situation économique devenue insoutenable pour les ménages, étouffante pour le tissu productif et périlleuse pour la stabilité sociale.

Thierno Bocoum
Président AGIR- LES LEADERS

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