Dans un entretien accordé à Financial Afrik, le professeur d’économie Maïssa Babou livre une analyse sans concession de la politique économique menée au Sénégal depuis 2012.
Alors que le FMI vient de décaisser plus de 1000 milliards FCFA, la spécialiste estime que cette mansuétude n’est pas justifiée au regard des maigres performances économiques du pays (4,1% de croissance en 2022).
Des infrastructures coûteuses au détriment du secteur primaire
Maïssa Babou dénonce en particulier les investissements massifs dans les infrastructures de transport (routes, autoroutes, TER), qui ont eu un coût exorbitant. “On ne mange pas les routes”, assène-t-il, expliquant que ces dépenses auraient pu être mieux orientées vers les secteurs productifs.
L’agriculture et la pêche devraient être la priorité absolue du Sénégal, qui importe encore massivement des denrées alimentaires. La souveraineté alimentaire doit être un objectif stratégique, qui permettrait en outre de créer des emplois dans le rural.
Manque de vision et gaspillages
Plus généralement, l’économiste reproche l’absence de vision économique du gouvernement. Selon lui, les investissements se font de façon désordonnée, sans stratégie de long terme.
Il pointe également les gaspillages liés à une bureaucratie pléthorique (38 ministres !), ainsi que les exemptions fiscales accordées au secteur minier, qui ne profitent pas à l’économie locale.
Un optimisme mesuré pour l’après-pétrole
Maïssa Babou se montre prudente quant aux retombées des futurs gisements gaziers et pétroliers. Ces ressources ne doivent pas constituer une “fin en soi”, mais seulement un “appoint” pour un Sénégal déjà riche de ses forces vives, indique-t-il.
A condition de mener des politiques rationnelles axées sur les secteurs productifs, le pays a les moyens de se développer par ses propres moyens. C’est le message optimiste mais réaliste que lance cet éminent universitaire.
Avec seneplus